13-10 novembre 2006
Réunis à Lourdes en Assemblée plénière, les évêques, ont pris acte de la réflexion engagée par le groupe de travail sur la mission actuelle de l’enseignement catholique dans la société française et dans l’Église, et l’ont chargé de poursuivre cette réflexion.
Cette réflexion s’inscrit dans une double perspective :
- Renouveler notre confiance à l’égard des directeurs diocésains et des chefs d’établissements pour la manière dont ils exercent leurs responsabilités au service de l’éducation des enfants et des jeunes, en tenant compte des évolutions auxquelles l’Enseignement catholique est aujourd’hui confronté et des questions qu’il se pose pour son avenir.
- Appeler aussi l’Enseignement catholique à manifester son caractère spécifique de l’intérieur de lui-même, c’est-à-dire de l’intérieur de sa responsabilité éducative, en associant à ce travail ceux et celles qui participent à l’exercice de cette responsabilité avec les directeurs diocésains et les chefs d’établissements – enseignants et enseignantes, animateurs pastoraux, associations de parents, organismes de gestion.
Cette réflexion se réfère à une conviction primordiale – l’Enseignement catholique – comme l’ensemble du système scolaire en France – est soumis à des logiques institutionnelles fortes, qui sont d’ordre administratif, juridique, financier, économique et politique. Ces logiques ne peuvent pas être ignorés, mais elles doivent être subordonnées à une logique plus fondamentale : celle de l’engagement éducatif chrétien dans l’enseignement catholique en France, avec deux éléments essentiels
L’accueil sans discrimination des enfants et des jeunes dont les parents souhaitent qu’ils soient formés dans des Etablissements catholiques d’enseignement (écoles, collèges, lycées).
Une relation réelle et structurante avec la foi chrétienne qui a inspiré la fondation de ces Établissements et qui demande aujourd’hui à être proposée à frais nouveaux, précisément sur le terrain spécifique de l’éducation des enfants et des jeunes, surtout s’ils sont en quête de repères pour, vivre.
Ce travail d’éducation et d’évangélisation appelle à des confrontations et à des échanges qui auront à être organisés au niveau local, provincial et national, en concertation étroite avec les organismes responsables de l’enseignement catholique, avec les tutelles congréganistes, en y associant nos services diocésains, spécialement ceux qui sont chargés de la pastorale des jeunes et tout particulièrement les aumôneries de l’enseignement public.
Le groupe s’engage à poursuivre sa tâche, en espérant qu’il sera pour tous une occasion de comprendre tout ce que représente et tout ce qu’exige cet engagement éducatif chrétien dans notre société et dans notre Église : il s’agit de progresser ensemble dans une véritable reconnaissance de l’ Enseignement catholique et de sa mission aussi bien à l’intérieur de notre société qu’à l’intérieur de nos Églises locales.
Éric AUMÔNIER
Évêque de Versailles
Président du Groupe de travail sur l’Enseignement catholique
1er février 2006
Enseignement catholique, que dis-tu de toi-même ?
Dix ans après le vote des statuts actuellement en vigueur dans l’Enseignement catholique, la Conférence des évêques de France a décidé d’engager une réflexion de fond sur la nature et les finalités d’un ensemble éducatif d’autant plus complexe qu’il doit faire vivre en symphonie, sous la responsabilité d’un chef d’établissement enseignants, jeunes, parents d’élèves, gestionnaires, formateurs, en lien et en consonance avec la Direction diocésaine.
Il faut rendre hommage, dans la plupart des cas, à la volonté des enseignants et plus largement de toute la communauté éducative, qui cherchent à créer un climat favorable à l’épanouissement de jeunes souvent désaxés par la vie, et qui trouvent dans l’établissement scolaire des raisons de vivre, de croire en eux-mêmes et d’édifier leur avenir.
Aujourd’hui où, notamment dans le domaine de l’éducation, les mutations pédagogiques sont particulièrement rapides, il est indispensable de revoir périodiquement la vocation originale de l’Enseignement catholique dans la nation et sa manière d’y répondre. Mais il faut le faire clans un climat de confiance et de concertation sans cultiver systématiquement le soupçon. Nous sommes en effet de ceux qui pensent que c’est une chance pour le pays et pour l’Église catholique d’avoir des établissements d’enseignement qui, sans rivalité avec l’Enseignement public, mais en complémentarité, apportent leur note originale puisée dans la Parole de Dieu et l’expérience chrétienne.
Sans doute ici ou là des dysfonctionnements existent. Des conflits de pouvoir peuvent surgir. Des organismes oublient parfois l’esprit de désintéressement qui devrait les animer au seul bénéfice des élèves. Le « caractère propre » peut être banalisé ou occulté, le climat social s’envenimer, les rapports humains se détériorer, la dimension spirituelle s’estomper. Or, il ne s’agit pas de laisser se perdre ce qui fait l’originalité de l’Enseignement catholique et qui justifie son existence et le soutien que leur apportent de nombreuses familles.
Il est bien évident qu’on ne petit pas accepter que l’enseignement catholique perde son âme. Par exemple, peut-on dire que l’Enseignement catholique est fidèle à ses sources et à son histoire s’il est simplement une « boîte à bac », s’il n’est pas une vraie communauté éducative, s’il n’honore pas la dimension spirituelle de l’homme, s’il n’ouvre pas à la question de Dieu et ne propose pas la foi au Christ comme sens de la vie, s’il n’est pas attentif aux plus défavorisés, s’il n’est pas accueillant à tous les jeunes sans discrimination, bref, si le climat dans lequel il s’inscrit n’est pas fondé sur les Béatitudes ?
En fait, l’Enseignement catholique connaît les problèmes de toute institution chrétienne dans le contexte d’une société pluraliste sécularisée. Et par ailleurs, il est atteint du syndrome de fragilité qui touche toutes les grandes institutions de notre pays, spécialement l’Éducation nationale. Une telle situation nécessite le courage de la foi, l’invention pédagogique, la force des convictions. Elle réclame surtout une volonté de travailler ensemble dans un climat de confiance et de sérénité.
Que l’Enseignement catholique poursuive une cure de rajeunissement déjà largement entamée, du sommet à la base, et il aura de beaux jours devant lui, du moins si toutes ses composantes n’ont qu’un seul et même souci : servir la vocation humaine et spirituelle des enfants et des jeunes.
Bernard PANAFIEU
Archevêque de Marseille
Texte publié dans L’Église aujourd’hui à Marseille du 1er février 2006.