Les élèves peuvent-ils porter des signes religieux ?
Sur quels fondements, juridiques et pédagogiques, répondre aux « signes religieux » qui seraient portés par des élèves dans un établissement catholique ?
- Dans un établissement privé, « le chef d’établissement assume la responsabilité de l’établissement et de la vie scolaire » (art. R442-39 du Code de l’éducation)
- La loi d’interdiction du port de signes religieux ostensibles ne s’applique qu’aux établissements publics (art. L141‑5–1 du Code de l’éducation)
- Même dans un établissement public, « Elle ne s’applique pas aux candidats qui viennent passer les épreuves d’un examen ou d’un concours dans les locaux d’un établissement public d’enseignement et qui ne deviennent pas de ce seul fait des élèves de l’enseignement public » (art. 2.3 de la circulaire d’application de la loi)
- Si le droit ne fait pas explicitement le lien entre voile islamique et dissimulation du visage, il convient cependant d’avoir une attention particulière pour vérifier que le port du voile n’exprime pas, de façon contrainte ou volontaire, ce que combat précisément la loi sur l’interdiction de la dissimulation du visage : atteinte au respect de la dignité de la personne, refus de communiquer avec les autres, refus ostensible de l’égalité entre les hommes et les femmes (circulaire d’application de la loi 2010–1192 interdisant le dissimulation du visage dans l’espace public et exposé des motifs de la même loi). Le port de la kippa, par exemple, n’est pas suspect de traduire cela.
- Enfin, il revient au chef d’établissement, aux enseignants au personnel de veiller à la sécurité des élèves à l’adaptation de leur tenue à l’activité pratiquée (tout particulièrement en laboratoires, ateliers, activités sportives).
En conséquence :
- Il n’y a pas lieu d’interdire systématiquement le port de signes religieux dans un établissement catholique qui est par ailleurs « ouvert à tous les élèves par choix pastoral » (art. 10 du Statut de l’Enseignement catholique).
- Le chef d’établissement est souverain pour faire respecter l’ordre dans son établissement. Il lui revient d’agir individuellement et en application du règlement intérieur contre toute personne qui, à travers sa tenue ou son comportement, nuirait à l’ordre, à la sécurité ou au bon fonctionnement de l’établissement ou du centre d’examen. Mais il s’agit alors de mesures individuelles et circonstanciées et non pas la seule application d’une règle générale.
Voir aussi :
- Note juridique Sgec : Règlementation applicable en matière de signes religieux
- Recommandation : Devise et drapeau sur la façade des établissements privés
- Recommandation : Discipline et Règlement intérieur
Un établissement doit-il retirer tout signe religieux (croix) lorsqu’il est centre d’examen ?
Aucune réglementation n’impose de retirer croix ou crucifix dans les centres d’examen organisés dans des locaux privés.
République laïque, la France « respecte toutes les croyances » (Article 1er de la Constitution) et rien n’interdit à un établissement d’enseignement privé sous contrat de manifester son appartenance à une religion, sous réserve de ne pas constituer un acte de pression ou d’atteindre à la liberté de conscience. Lorsque l’État fait appel à un établissement privé pour être centre d’examen, c’est au nom de son association par contrat au service public et en connaissance de cause :
« Dans les établissements privés qui ont passé un des contrats prévus aux articles L. 442–5 et L. 442–12, l’enseignement placé sous le régime du contrat est soumis au contrôle de l’État. L’établissement, tout en conservant son caractère propre, doit donner cet enseignement dans le respect total de la liberté de conscience. Tous les enfants sans distinction d’origine, d’opinion ou de croyances, y ont accès. »
(Article L442‑1 du Code de l’Éducation)
ce que la jurisprudence confirme :
« En vertu de l’article L442–1 du Code de l’éducation, les établissements privés sous contrat ont droit au respect de leur caractère propre et sont à ce titre libre d’apposer des signes religieux dans leurs locaux. En ce qui concerne l’organisation des examens, le juge administratif a considéré qu’« aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général du droit n’interdit à un recteur d’utiliser, en tant que de besoin, des locaux autres que ceux des établissements publics d’enseignement et notamment ceux d’un établissement d’enseignement privé pour organiser les épreuves d’un examen tel que le baccalauréat ; qu’une telle décision ne méconnaît par elle-même ni le principe de laïcité ni celui de neutralité des personnels de l’éducation nationale » (TA Bordeaux, 4 mai 2005, n° 0402516) »
Réponse du Ministère de l’éducation nationale publiée dans le JO Sénat du 10 juin 2010
La question n’est d’ailleurs pas la croix en elle-même, qui ne porte aucun préjudice et n’est qu’un signe, un élément d’un ensemble — comme le sont le nom de l’établissement, son histoire, son projet, son organisation ou la présence d’une chapelle… Supprimer ce signe serait faire violence à l’identité de l’établissement sans retirer pour autant son caractère catholique auquel le signe renvoie.
Si un candidat ou un surveillant viennent à interroger le chef de centre sur la présence d’une croix ou d’un crucifix dans la salle d’examen, il conviendra de leur manifester une écoute attentive et bienveillante. On pourra leur faire remarquer qu’il s’agit là d’un élément d’identité de l’établissement qu’on ne peut pas nier, que cela ne contrevient pas aux dispositions légales et réglementaires et que la liberté de conscience de chacun reste entière, étant entendu que l’ornementation de la salle ne sous-entend ni ne requiert aucunement l’adhésion à la foi chrétienne de ceux qui y sont accueillis.
Voir aussi :
Note juridique Sgec : Règlementation applicable en matière de signes religieux
© Direction diocésaine de l’Enseignement catholique de Paris • 2011